Une foule record d’adultes ravis et d’enfants émerveillés a assisté le 26 octobre à la remise à l’eau réussie de six jeunes phoques rescapés, à la pointe sud de la Baie de Somme, au hameau du Hourdel, près de Cayeux-sur-Mer, a constaté un journaliste de l’AFP.
« Il y avait au moins 2.000 personnes », s’est félicité le président de Picardie Nature Patrick Thiery, association qui rendait à la vie naturelle, pour la dixième année consécutive en public, de jeunes veaux marins retrouvés depuis juin échoués, sans leur mère, avant d’être sevrés.
Vers midi, une assistance nombreuse, dont de nombreux enfants, s’est rassemblée sur une grève de galets, plusieurs mètres en arrière, et sur les côtés des six caisses contenant les animaux. Tous ont respecté la consigne de silence donné par les responsables de Picardie Nature, afin de ne pas effrayer les jeunes veaux marins. Seuls quelques petits enfants ont fait entendre leur babillement ou leurs interrogations, sous un beau soleil automnal, face à une mer laiteuse.
Des six pinnipèdes, c’est « Tana », la seule femelle, qui a eu le moins peur d’affronter la marée, se jetant sans hésiter à l’eau, sous les regards de l’assemblée. Les cinq autres phoques, des mâles portant aussi des noms de rivière (Mississippi, Léna, Nil, Garonne et Authie) ont rallié plus prudemment leur milieu d’origine, sous le contrôle d’un canot pneumatique de Picardie Nature, placé à une centaine de mètres du rivage.
Un carré blanc, appelé « repère visuel » par Picardie Nature, a été placé comiquement sur le crâne des phoques, afin de pouvoir plus facilement les surveiller. Il devrait tenir six mois.
Séparés accidentellement de leurs mères, par les intempéries ou l’intrusion des humains dans leur voisinage, ou encore parce qu’ils étaient atteints d’une maladie, les phoques, sevrés dès leur arrivée au centre de soins de la réserve de la Baie de Somme, ont suivi un régime alimentaire à base de bouillie de poisson. Il permet de les fortifier, mais ne leur donne pas une croissance aussi rapide que le riche lait maternel.
« Ils ont mis trois mois à atteindre ce poids de trente kilos, qui est un poids qui a été déterminé comme le poids minimal pour pouvoir ensuite survivre dans la nature », a expliqué M. Thiery.
Selon celle qui a supervisé avec passion leur remise en forme, Laetitia Dupuis, « ces jeunes veaux marins n’auront aucun mal à s’intégrer aux groupes qui les attendent au large. Il n’y a pas de notion de territoire chez les adultes, qui les accueilleront volontiers ».
Quelque 80 naissances de veaux marins ont été recensées cette année en Baie de Somme, et une en Baie d’Authie, soit 81, contre 58 en 2013, 55 en 2012 et 52 en 2011.
Malgré cette progression, le nombre de veaux marins a tendance à se stabiliser dans les deux baies: il a atteint un pic annuel de 394 en août, et peut baisser au minimum à 100 à 150 les autres saisons, selon Picardie nature. Les phoques gris sont, eux, estimés à 149, selon cette source.
Sur les 81 nouveaux-nés, 21 sont morts depuis, et 13 ont été recueillis par le centre, situé non loin du Hourdel. Douze au total ont été relâchés (six autres ayant été précédemment relâchés en mer sans public) et un seul, retrouvé en septembre avec une maladie buccale, reste encore soigné au centre.
A force d’être chassées pour leur graisse, leur chair et leur peau, le phoque gris et le veau marin avaient pratiquement disparu des rivages picards et flamands au début du 20e siècle. La chasse ayant été interdite en 1972, leur retour dans les années 1990 n’a pas fait plaisir à tout le monde.
Une polémique a éclaté sur la Côte d’Opale au sujet des dégâts aux matériels de pêche imputés aux phoques, ou de leur prélèvement sur les stocks de poissons, certains pêcheurs réclamant que la population soit régulée…