Moulé à la louche, cuit au chaudron, fabriqué en Normandie…Vraiment ? « 60 millions de Consommateurs » passe au crible les recettes des industriels de l’alimentation et dénonce fausses allégations, petites arnaques et vrais coups marketing.
L’industrie agro-alimentaire compte en France plus de 16.000 entreprises, emploie 440.926 salariés et a réalisé cette année plus de 170 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Le premier secteur économique de France, pays de la gastronomie, se doit d’être irréprochable et transparent. Une volonté que les professionnels, l’Association nationale des industries agroalimentaires (Ania) en tête, martèlent à l’envi. Qu’en est-il réellement ?
Après les scandales de la vache folle ou des lasagnes à la viande de cheval, les industriels acceptent-ils d’ouvrir leurs portes ? Ou continuent-ils de prendre les consommateurs pour des imbéciles ? Adeline Trégouët, rédactrice en chef déléguée à « 60 millions de consommateurs », aidée d’une escouade de journalistes, est partie à l’assaut du monde très fermé des industriels de l’agro-alimentaire.
A la clef, de bonnes nouvelles, de jolis reportages dans de grosses PME soucieuses de bien faire, mais encore beaucoup d’arnaques. Ce hors-série se lit comme un manuel de survie du consommateur au XXIe siècle et démontre, s’il en était besoin, qu’il y a encore beaucoup de chemin à parcourir pour mettre de l’ordre dans ce secteur ultra-sensible. Morceaux choisis.
- « A l’ancienne », « traditionnel » : ces allégations trompeuses
« Depuis les scandales de la vache folle ou des lasagnes à la viande de cheval, les consommateurs ont faim de produits ‘authentiques’. Les industriels l’ont bien compris : les allégations ‘traditionnels’ ou ‘à l’ancienne’ se multiplient sur les emballages. Certaines sont strictement réglementées. Ainsi, ‘fabrication artisanale’ ne peut être employé que si le fabricant est un artisan inscrit au registre des métiers ; « fabrication traditionnelle » ne s’applique qu’aux produits sans additifs qui respectent une recette traditionnelle. »
- Du « pink slime » dans les nuggets
Non, Mac Donald’s ne met pas d’antivomitif dans ses Big Mac. Mais oui, ce n’est pas une légende, le « pink slime » – cette pâte rose constituée des morceaux les moins nobles du poulet mixés avec de l’ammoniaque pour tuer les bactéries – a bien servi à la fabrication des nuggets. Elle n’est cependant plus employée depuis 2010. En France, la chaîne de fast-food reçoit d’ailleurs quelques bons points.
- Les « champignons de Paris » venus de Chine
« Moutarde de Dijon, herbes de Provence, galettes bretonnes… La référence à une ville ou à une région ne signifie pas toujours que les produits y ont été fabriqués. Il faut redoubler d’attention pour découvrir d’où ils peuvent venir.«
Bon à savoir : les champignons de Paris sont en majorité importés de Chine, d’Europe de l’Est, des Pays-Bas et des Etats-Unis. Le jambon Aoste n’a rien d’italien mais est produit en France à partir de porcs élevés dans l’Union Européenne. Tous les escargots de Bourgogne sont importés d’Europe de l’Est ! Et une subtilité qui n’a pas échappé aux amateurs de camembert mais qui trompe le plus grand nombre : le camembert de Normandie est une appellation d’origine protégée tandis que le camembert fabriqué en Normandie peut l’être avec du lait d’une vache anglaise…
- Le « chaudron », cette grande bassine
« Cuit au chaudron : on imagine une marmite renflée de potion magique mijotant sur un feu, remuée à la grande cuillère en bois, au milieu d’un banquet gaulois. Côté législation, il n’existe aucune définition officielle de la cuisson au chaudron. Dans la réalité de l’usine, c’est une grande ‘bassine’ ouverte… »
Source : le nouvel Obs – Corinne Bouchouchi 06 2016
Crédit photo : By sunny mama (cauliflower crust pizza slices) [CC BY-SA 2.0 (http://creativecommons.org/licenses/by-sa/2.0)], via Wikimedia Commons